M&A 2015 : Top 25 des banquiers et avocats d’affaires

janvier 18, 2016

Non contents de s'approprier des deals sur lesquels ils ne sont pas intervenus, certains banquiers pris en flagrant délit de falsification n'en démordent pas en tentant de se justifier maladroitement. Parfois en désespoir de cause, les plus acharnés n'hésitent pas à tenter de vous intimider, voire à vous menacer de représailles.
Marri de ne pas se faire créditer un deal où il était du mauvais côté du dual track, Emmanuel Hasbanian aveuglé par l'enjeu des league table dont il est pourtant l'un des premiers à minimiser la portée, a malheureusement franchi le Rubicon. En prenant le risque comme Jérôme Calvet, 7 ans plus tôt, d'arriver à destination mais directement au Capitole sur la roche Tarpéienne.
A l'évidence tous ces comportements pour le moins répréhensibles n'auraient pas déplu à Jawad Bendaoud, le squatter mytho, sans scrupules, devenu la risée des réseaux sociaux pour avoir (à l'inverse des banquiers d'affaires) minimisé (à l'excès) le rôle qu'il a tenu. Avant d'être rattrapé par la justice et d'écoper de 33 ans de prison, OJ Simpson, le légendaire running back de la NFL, en avait fait autant avec un incroyable aplomb. Heureusement depuis Edouard Stern, aucun autre acteur du M&A n'a fini comme la femme de Juice, l'ex-n° 32 des Buffalo Bills puis des San Francisco 49ers même si Erik Maris et Vincent Catherine se sont fait peur en scooter.
Dans ce métier à cycle long qu'un jeune ministre brillant et dynamique a comparé (en connaissance de cause) au plus vieux du monde, il est nécessaire de se démener pour récupérer des clients. Après l'avoir délaissé au profit du financement, au cycle plus court, Barclays et UBS tentent d'opérer (avec difficultés si l'on se réfère à leur place dans les classements), un retour par la petite porte.
Ceux qui attendaient, en raison de rumeurs persistantes depuis la fin de l'été, une exode massive en M&A chez Deutsche Bank, ont du se contenter du départ de Marc Paudraud chez JP Morgan et de Valéry Barrier (en ECM) chez Citi. Ce dernier a déploré celui de Jérôme Morisseau parti rejoindre Bank of America Merrill Lynch (BAML). Depuis longtemps sur la sellette, Jérôme Peltier remplacé par Grégoire Haemmerlé soulagé de quitter JP Morgan où il avait hérité du Liberia en proie à l'épidémie d'Ebola, a atterri chez Jefferies.
Lazard a continué à se renforcer en attirant Charles Andrez transfuge de Canaccord Genuity et en récupérant François Guichot Perere en provenance de M&M's. Boutique que Fady Lahame a rejoint après son départ de Credit Suisse en compagnie de François Roussely.
En sens inverse Frédéric Chiche a quitté Benoit & Associés pour ING. Chez les avocats, plusieurs mouvements significatifs (Philippe Rosenpick, Arnaud Pérès, Christopher Grey, etc..) ont animé le marché qui a unanimement salué le retour de Marcus Billam chez Darrois Villey tout en se montrant circonspect sur la réapparition de Laurent Faugerolas sur les écrans radar.
Porté par une vague sans précédent de méga-deals, le marché M&A a battu, en 2015, son précédent record (4,5 Bn$) établi en 2007, en franchissant pour la 1ère fois la barre des 5 Bn$ de transactions annoncées dans le monde. Avec une prépondérance pour la zone américaine (2,8 Bn$) qui devance l'Asie (1,05 Bn$) et l'Europe (888 Md$). A la recherche d'effets de synergie destinés à renforcer leur position et améliorer leur rentabilité, plusieurs grands groupes ont mis à profit les excellentes conditions de marchés (abondance de liquidités, taux bas) pour mener à bien des fusions de grande envergure.
La plus emblématique, Allergan-Pfizer (160 Md$) devrait célébrer, si elle est menée à terme, l'union du Viagra et du Botox et créer le n°1 mondial de la pharmacie. En pleine campagne électorale outre Atlantique, la 2ème fusion de tous les temps derrière Mannesman-Vodafone (1999) entraînant le plus gros exil fiscal, n'a pas manqué de soulever la polémique. Après ses tentatives infructueuses menées, en 2014, sur AstraZeneca puis sur Actavis (avant le rachat d'Allergan), Pfizer semble être, finalement, arrivé à ses fins avec une persévérance digne d'un multirécidiviste.
Reste à savoir dans quelles mesures l'anti-trust va bénir cette union comme celle des brasseurs SABMiller-AB Inbev (117 Md$) et le rachat de BG Group (82 Md$) par Royal Dutch Shell. Crédité de ces 3 opérations hors norme et d'autres plus modestes, le Royaume-Uni pourtant en proie au débat sur le Brexit, réalise une année record (+ 22%) à l'instar des Etats-Unis (+ 25,4%).
En revanche, le bilan est plus contrasté en France (160 Md$) - l'équivalent de la fusion Allergan-Pfizer - en raison du décalage créé par l'annonce en 2014 de plusieurs deals closés en 2015. C'est le cas d'Alstom-GE (12,3 Md€) après le rabais de 300 M€ accordé au repreneur en raison de l'attente interminable du feu vert de Bruxelles conditionné à la vente d'actifs (1 Md€) à l'italien Ansaldo détenu (40 %) par Shanghai Electric Group.
Pris à défaut par ce report inattendu, Opérations Financières a procédé à la rectification qui s'imposait après avoir crédité (à tort) ce deal (12,6 Md€), en 2014, à Rothschild & Cie, BAML, Credit Suisse, Lazard, Weil Gostshal, Bredin Prat, et partiellement à d'autres (Citi, HSBC, Darrois Villey, Cleary Gottlieb et Orrick). Aussi en raison de l'attente de l'avis du CMA britannique sur la vente d'EE (12,6 Md€) à BT et du résultat de l'OPA de Nokia sur Alcatel Lucent (14,42 Md€), ces 2 deals n'ont pas été crédités en 2015.
En revanche, s'opposant à la déchéance de nationalité injustement infligée à Altice par certaines publications (Agefi, Dealogic etc..), Opérations Financières a bien comptabilisé Portugal Telecom (7,2 Md€) mais également Suddenlink (8,3 Md€) et Cablevision (16,3 Md€) à hauteur de 70% (BC Parners et CPPIB détenant le solde du capital de ces 2 opérateurs américains).
Pour montrer s'il était encore besoin, l'aberration de certains classements, le rachat de l’américain Cytec (5 Md€) par le belge Solvay a été rattaché à la France. Idem pour les 40% d'Eurostar (828 M€) détenus par la Couronne qu'elle a cédé au canadien CDPQ !
Avec Lafarge-Holcim (25 Md€), Gvt-Telefonica (7,6 Md€), les actifs des 2 cimentiers (6,5 Md€) cédés à l'irlandais CRH pour cause d'anti-trust, Igate-Cap Gemini (4,1 Md€), Jazztel-Orange (3,8 Md€), TDF (3,55 Md€), le top ten des deals completed recensés par Opérations Financières atteint 87.6 Md€ contre 56 Md€ l’an passé.
En comptabilisant d'autres largecap telles Norbert Dentressangle-XPO (3,24 Md€), Verallia-Apollo (2,94 Md€), Sapient-Publicis (2,7 Md€), GE Capital Fleet-Arval (2,5 Md€), Orange Suisse-NJJ (2,3 Md€), 2015 s'avère être un bon millésime (completed). En revanche, le suivant s'annonce plus difficile avec un environnement international plus compliqué résultant du décrochage des BRIC lié à l'embargo sur la Russie, au krach boursier de la Chine, à la crise politique et économique au Brésil d'où Vivendi est sorti dans un parfait timing. Mais également à la nervosité apparue à l'automne sur les marchés actions et de dettes.
Très exposé en raison de son recours (jugé excessif) à la dette (26 Md€) pour financer son développement au Portugal et outre Atlantique, Altice se retrouve au centre de toutes les attentions. Ce qui ne semble pas déplaire pas à Patrick Drahi comme, en son temps, à J2M.
Les conséquences des attentats ont lourdement pesé sur plusieurs secteurs (tourisme, hôtellerie, loisirs et transport). Si ces événements tragiques ont reporté sine die la vente du Shangri La Paris, AccorHotels, candidat malheureux à la reprise de Louvre Hôtel, a changé son fusil d'épaule pour se tourner vers le haut de gamme avec le rachat du canadien FRHI (2,6 Md€), propriétaire des enseignes Fairmont, Raffles et Swissôtel.
Dans le transport, CMA-CGM a pris les devants en procédant à une manœuvre audacieuse sur le singapourien NOL (4,6 Md€). Idem pour Air Liquide qui s'est senti pousser des ailes en lançant la plus grosse acquisition de son histoire avec pour cible l'américain Airgas (12,3 Md€). Quant à Merial, son sort est au coeur du swap qui se dessine entre Sanofi et l'allemand Boehringer.
Concernant le sauvetage d'Areva estimé entre 8 et 10 Md€, l'issue des négociations tient toujours en haleine les divers protagonistes de cet épineux dossier où la schizophrénie de l'Etat actionnaire semble atteindre son paroxysme après l'épisode des droits de vote double sur Renault et la partie de bras de fer engagée avec Carlos Ghosn. En tout cas cette ”exception française” va permettre à Vincent Bolloré de prendre, au printemps 2017 (après le délai de 2 ans), le contrôle (avec 30% des droits de vote) de Vivendi à moindre frais (5% en cash+ 10% en prêt de titres). Surtout après l'augmentation du dividende votée sous la pression d'un fonds activiste dont la demande semble être tombée du ciel. Sur Telecom Italia - un swap portant sur 8,24% de l'opérateur italien détenu par Telefonica contre 4,5% de Telefonica Brasil aux mains de Vivendi -, le procédé (un collar) est beaucoup plus sophistiqué. En effet pour se couvrir, Mediobanca a vendu les titres (4,76%) de la cible à Vivendi portant ainsi sa participation à 13%.
Sans surprise, 2015 a eu son lot de déboires avec le pied de nez de Worlpay (6 Md€) à Ingenico dont l'IPO a contenté Bain Capital, auteur d'un TRI de 55%. Dans ce domaine, Saint Gobain n'est pas en reste. Au bout de 13 mois, ses visées sur le suisse Sika (2,5 Md€) sont toujours dans l'impasse. Comme à son habitude, le dynamisme du private equity alimenté par des fonds cherchant à investir massivement pour assurer leur survie, a soutenu l'activité du M&A.
Disposant d'un accès quasi illimité au marché de la dette avec un levier pouvant facilement dépasser 6 fois l'Ebitda (un palier que les banques américaines s'interdisent de franchir), plusieurs deals ont crevé le plafond avec des valorisations supérieures aux estimations. Verallia (2,94 Md€), Webhelp (1,03 Md€), Linxens (940 M€), Cooper (770 M€), AD (705 M€), Solina (650 M€), Comexposium (550 M€), Siaci (530 M€), Vivalto (380 M€), Cerelia (310 M€), Studialis (275 M€), Stella (265 M€), Metrologic (240 M€), Auxiga (50 M€) ont été bien vendus.
Quelques accidents de parcours ont été relevés avec des prix moins élevés qu'attendus comme Labco (1,2 Md€) après l'échec de son IPO, B&B (800 M€) et IKKS (530 M€). D'autres se sont négociés à leur prix : Vizada (400 M€), Tractel (365 M€), TLD (280 M€), Averyx (260 M€), Interflora (200 M€), Circet (175 M€), Bruneau (125 M€), Rougnon (80 M€), Caillau (55 M€).
Comme chaque année, plusieurs LBO (Genoyer, Grande Récrée, Vivarte, Darel, SIA, JOA, Alma, Apcoa) et corporate (SNCM, Latécoère, Exeltium, Arc International, Ascometal) ont animé la rubrique faits divers. Dans ce domaine, la palme revient (à nouveau) à l'Espagne avec le désastre annoncé d'Abengoa, le spécialiste des énergies renouvelables.
Avec la chute du baril en dessous des 30 $, plusieurs sous-traitants pétroliers (CGG, Vallourec, Bourbon, Technip) sans oublier Harkand, participation d'Oaktree, font face à de sérieuses difficultés.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, Eramet n'est pas non plus épargné. Quant à Zodiac Aerospace pointé du doigt par Airbus pour le retard de l'A350 qui lui est imputable, ses problèmes de logistique et d'organisation vont lui coûter cher.
En prônant l'orthodoxie financière et en l'appliquant à la lettre une méthodologie simple et pérenne, Opérations Financières s'efforce d'offrir la vision la plus réaliste possible du marché français du M&A. Comme le deal of the year a été initié et piloté des 2 côtés par les actionnaires - GBL (29,3%), NNS (19,4%) - de Lafarge et - Swiss Cement (20,11%), Eurocement (10,82%) - d'Holcim, laissant peu de place aux conseils des mariés, le crédit du deal a tenu compte des fees touchés par chacun.
Aussi son absence de cette fusion perdante pour Lafarge, n'a pas empêché JP Morgan conseil et prêteur attitré d'Altice, de se retrouver en haut du podium entouré de BNP Paribas qui accompagne aussi mais de façon moins systématique Patrick Drahi dans sa boulimie de développement. Ne disposant pas de bilan, Rothschild & Cie qui n'intéresse pas le magnat des télécoms, réussit à accrocher la 3ème place.
Avec la réforme du droit des obligations et l'instauration d'une quote-part de frais et charges (1%) sur les dividendes éligibles au régime mère-fille, les law firm ont du pain sur la planche même si certaines savent mieux ”tirer les marrons du feux” que d'autres moins dégourdies.
Affaibli par le départ de Marcus Billam, Allen & Overy, lauréat de la précédente édition, rétrograde à la 11ème place. Le magic circle se voit ravir la pole position par son ex-dauphin, Darrois Villey qui distance tous ses confrères et notamment les autres occupants d'un podium au format Jedburgh, avec l'américain Cleary Gottlieb et l'anglais Linklaters aussi impliqués sur le deal of the year. Plus expérimenté, Darrois Villey a été chargé par Holcim d'épauler Linklaters sur les aspects boursiers.
Au pied du podium, on retrouve Bredin Prat mais également Mayer Brown porté par l'activité d'Altice à l'international.

 

 

Méthodologie : Ont été recensées les opérations clôturées au 31 décembre 2015, y compris celles dont les conditions à leur réalisation étaient levées à cette date. Le crédit du deal est calculé sur la valeur d’entreprise de la cible au prorata du capital détenu par la partie conseillée. Ont été exclues du classement les restructurations financières (à l'exception des debt equity swap), les attestations d’équité, les opérations de marché, les opérations inférieures à 20 % du capital en dehors des renforcements stratégiques. Pour les avocats, les tax planning (sauf exception) et les conseils anti-trust n’ont pas été pris en compte. Dans tous les cas, seuls les mandats M&A dont la substance est suffisante, ont été comptabilisés.