Law firm : Réception, étiquette et savoir vivre

février 5, 2019

Si l'on en juge par cette altercation entre un DJ et un managing partner lors de la party d'une law firm dont le nom circule, organiser une réception n'est pas de tout repos. Comme ces initiales (pas celles d'Hervé Pisani) sont également celles désignant les directeurs juridiques (les gros clients des avocats d'affaires), le terme “ambianceur” utilisé en Afrique aurait été plus approprié pour éviter toute fâcheuse confusion.
Mais pour se garder d'accentuer le caractère ethnic de cet article, ce choix n'a pas été retenu.
Outre gérer les préparatifs de ce genre d'event, prendre soin d'anticiper au mieux la survenance d'impondérables comme inviter par mégarde un individu de la trempe d'Hrundi V. Bakshi (l'équivalent d'une arme de destruction massive à l'aspect inoffensif) peut se révéler judicieux. En se rendant compte, après coup, des conséquences, certains regrettent de n'avoir pas fait appel à un professionnel du risk management si possible estampillé AMRAE.
Sous d'autres cieux moins cléments, cela ferait depuis longtemps que Frédéric LacroixVincent HattonThomas Courtel, Gilles Saint Marc, Gäetan Giannosso, Guy Benda et bien d'autres experts en impairs, auraient connu le sort de l'infortuné Jamal Khashoggi.
Passer Daniela puis La caissière de chez Leclerc, 2 tubes d'Elmer Food Beat, aurait pu justifier ce clash. Il n'en n'est rien puisque l'épouse de cet avocat ne s'appelle pas ainsi et qui plus est, elle ne travaille pas.
Comme il est difficile d'y voir clair, de surcroit “la nuit tous les chats sont gris”, mieux vaut laisser la justice qui a été saisie, trancher ce différend. Surtout au moment où Médiapart et France Inter font l'objet d'un procés en diffamation comme les 6 femmes ayant accusées l'ex-député EELV, Denis Baupin, de violences sexuelles.
En septembre dernier, Jean-Vincent Placé, a lui été fixé sur son sort après avoir plus qu'importuné, 5 mois plus tôt, 3 femmes dans un nightclub ; menacé, raillé le videur puis insulté des policiers de la BAC pour finir 34 heures en garde à vue. Défendu par Kiril Bougartchev, l'ex-sénateur et secrétaire d'Etat n'a été condamné qu'à 3 mois de prison avec sursis et 1000 € d'amende (sans inscription sur le casier judiciaire). D'autres affaires du même type le concernant ne devraient pas tarder à remonterà la surface.
Dommage pour Thomas Elser de ne pas avoir eu son ex-associé comme avocat. En perdant en appel, ce tax partner de Linklaters basé à Münich (13 ans), forcé de rejoindre TaxGate Partners (4 ans), est parti en prison purger sa peine. L'an passé, il avait été condamné à 3 ans et 3 mois d'emprisonnement pour violences sexuelles pendant la traditionelle party du magic circle organisée durant l'Oktoberfest (2014).
La jeune stagiaire agressée dans le jardin d'un restaurant n'avait dû son salut qu'à l'intervention musclée de Laurenz Schmitt, un associé en corporate litigation renvoyé dans la foulée par Linklaters avant d'être condamné (7 mois de prison avec sursis et 150 heures de TIG) pour coups et blessures volontaires.
Prêt à déballer son sac sur les moeurs ayant court chez ce magic circle, Frank Mellish, son ex-director BD en possesssion selon lui de documents compromettantsa été empêché de le faire par une injonction judiciaire. En prenant connaissance de ce fait divers, ceux habitués à croiser le regard désaprobateur de leurs associés, ont eu des sueurs froides. Mais la France n'est pas l'Allemagne (même si elle a bien failli l'être et que l'Alsace et la Lorraine l'ont été plus d'une fois).
Place Vendôme, un partner en droit public a utilement contribué à faire avancer la jurisprudence en matière d'harcèlement moral et sexuel dont l'accusait une ex-collaboratrice. Devenu associée du bureau d'une law firm basé à Singapour, cette dernière n'a pas obtenu gain de cause à l'issue d'un procès fleuve qui s'est terminé par un non lieu rendu par un arrêt (Cour de Cass - chambre criminelle 26-04-2017).
Certaines espèrent bien qu'avec l'année du cochon, les langues vont commencer à se délier pour mette fin à l'immunité dont bénéficient ces usual suspects dont le nom revient avec insistence notamment à l'occasion des cocktails. Pour l'heure, les sextings de Bill Voge, l'ex-managing partner mondial de Latham & Watkins n'ont toujours pas donné lieu à des poursuites judiciaires.
Suite à cette affaire, à Paris et dans tous les bureaux de cette law firm, des consignes claires ont été données pour calmer les ardeurs des plus entreprenants. La perspective de prendre la porte comme se nomme l'un de leurs associés réputé pour sa muflerie mélancolique, devrait les en dissuader.
Mal supporter l'alcool peut conduire à certains désagréments et les femmes n'échappent pas à cette règle. Ce soir là, l'épouse de ce managing partner aurait dû rester tranquillement chez elle plutôt que d'accompagner son mari à la chrismas party du cabinet où les conjoints n'étaient pourtant pas invités.
Après une entrée remarquée (son manteau de vison en particulier par celles habituées aux polaires), une soirée arrosée plus que de raison, son départ précipité sur une civière (de fortune) ne manqua pas de créer un certain embarras dans l'assistance. Face à la tournure prise par les évènements, l'impassibilité de son mari, qui en avait vu d'autres, suscita plus le respect que la compassion et ce bien au delà des mûrs de cette US law firm.
Heureusement, toutes ces soirées in house ne finissent pas ainsi même si elles sont parfois l'occasion de quelques égarements ayant conduit plusieurs partners à divorcer et aider certaines collaboratrices à devenir leur égal. Ainsi retrouver, avec la bienveillance de la perfide Albion, l'allégorie de la République à Jodhpur sans passer par Pondichéry, constitue une performance. Mais parfois ce qui se passe à Vegas, n'y reste pas.
Ainsi quelle ne fût pas la surprise des managing partners de plusieurs bureaux de ce magic circle dont évidemment celui de Francfort de découvrir, un jour, dans leur boîte mail, un message du mari de l'assistante d'un tax partner de Paris (encore un mais plus pour longtemps) les prévenant, à sa manière, qu'il avait découvert le “pôt aux roses”.
Quand cela arrive en interne, il y a toujours moyen de trouver un arrangement même si les gens bien informés finissent toujours par le savoir. En particulier dans les structures éponymes où le fondateur faisant la pluie et le beau temps, dispose d'importants moyens de pression.
En revanche dans les US law firm, le disclosure est la règle avec à la clé une sanction immédiate (parfois disproportionnée aux faits reprochés) et ce jusqu'au plus haut niveau. Les résultats des enquêtes sur des associés présentés comme des molèles du genre sont parfois l'occasion de découvrir leur vraie nature.
Cela devient beaucoup plus difficile quand il s'agit d'un event ouvert aux clients où le manque d'étiquette et de savoir vivre, en général, ne passent pas inaperçus, du moins chez ceux qui en ont.
Si le fait de se retrouver entre-soi peut justifier ce relâchement que l'on retrouve dans le dress code, autorise-t-il pour autant certains débordements ?
Non pour les plus conservateurs, oui pour les plus ouverts d'esprit mais dans certaines limites à ne pas franchir. Allègrement dépassées, elles ont conduit, en 2012, la BSPP à supprimer l'une de ses unités sportives de 93 ans d'âge.
Lors de la remise du Prix Jean François Prat (7ème édition), le DJ avait manifestemment reçu carte blanche comme l'Immaculée Conception pour passer sexual healing, I'm coming out et d'autres titres plus ou moins suggestifs. Déjà plus que festive avec la présence de nombreux réprésentants du monde de l'art, l'ambiance est montée (naturellement) d'un cran quand les alumni et les collaborateurs ont été invités en 2ème partie de soirée après le départ des prestigieux invités du cabinet laissant derrière eux un buffet déjà bien entamé.
Mais rien de bien méchant, tout au plus quelques familiarités. Quoi de plus naturel, pour des gens habitués à travailler ensemble ! Egalement aperçu à l'Hôtel Mona Bismarck, le soir de cette fameuse party, le témoignage de cet alumni de Bredin Prat (il ne s'agit pas de Kee-Yoon mais juste de l'un de ses admirateurs) arrivé dans les bagages de son associé pour le devenir lui même, vaut son pesant d'or.