Tenter de résoudre la quadrature du cercle, c'est en quelque sorte ce que ce festival que l'on ne présente plus, a réussi. Même ceux qui tenaient à voir un chinois aller au-devant d'un tank pour fêter un anniversaire, ont eu gain de cause avec Opération Red Sea.
Décrit comme ”magique et débordant d'énergie positive” par SEM l'Ambassadeur Zhai Jun, ce film d'action met en scène des commandos de la marine chinoise combattant des preneurs d'otages islamistes. Dans le feu de l'action, l'un des 8 membres de l'escouade se retrouve nez à nez avec un char ennemi dans le désert en pleine tempête de sable.
Quelques semaines plus tôt, une précédente coïncidence s'était produite lors de la revue navale de Qingdao (ville jumelée à Brest) organisée pour le 70e anniversaire de la marine chinoise. Un brouillard à couper au couteau et à vous glacer le sang comme celui des infortunés marins de la flotte impériale dans Détective Dee : La Légende du Dragon des Mers, avait perturbé les festivités et gâché le spectacle auxquels la Frégate le Vendémiaire n'avait pas été en mesure de participer.
Et pour cause, accusée (à tort) d'avoir empiété sur les eaux territoriales chinoises en traversant le Détroit de Taïwan pour s'y rendre, la marine chinoise avait décidé d'annuler son invitation. Bien peu de chose comparé au HMS Devonshire coulé, en 1996, en Mer de Chine dans Tomorrow Never Dies.
Heureusement la Mercedes Classe S du CMD de la RPC est arrivée à bon port. Invité à présider la cérémonie d'inauguration de cette 9e édition qui cette année se déroulait dans le Salon Pompadour (la favorite de Louis XV, l'équivalent de Jiang Qing pour Mao) du Meurice, Zhai Jun a été ponctuel. C'était son dernier festival, après 5 ans de bons et loyaux services, cet ambassadeur en poste à Ryad avant d'arriver à Paris, va partir durant l'été pour de nouvelles aventures.
Cette ponctualité est d'autant plus méritante que cela n'était pas gagné d'avance avec les travaux de voierie entravant la circulation de la rue de Rivoli comme de plusieurs autres artères de la Capitale. Déroulé pour accueillir comme il se doit cet invité de marque, le tapis rouge a malheureusement été souillé avant son arrivée par un tricycle hilare et édenté transportant des touristes low cost.
C'est ça la France comme l'a chanté Marc Lavoine, “il ne faut jamais les oubier ces 3 mots qui se terminent en té .....et sa liberté de la presse ce n'est pas qu'une impression”.
Un choc culturel dont les chinois ont parfois du mal à se remettre surtout quand un pays 20 fois moins peuplé se permet de leur faire la morale. Pour tous ceux qui ont vécu avec honte le saccage de l'Arc de Triomphe avant Noël, comme la parade de la Werhmacht après la débacle de 40, il faut bien admettre que certains devraient balayer devant leur porte.
Se déroulant non loin de la Place de la Concorde où la guillotine a acquis ses lettres de noblesse, l'évènement culturel chinois présenté comme le plus important en France a été immortalisé par un clap de film avec l'inscription 7 villes 7 films, en guise de décor. Cette ressemblance n'étant pas fortuite puisque le chiffre 7 est aussi celui des sacrements et en particulier du dernier.
Que dire du chiffre 1444, le nombre de jours de lutte du peuple français pour sa libération dont on fêtait le 75e anniversaire du D Day cette année. De quoi donner des sueurs froides aux nombreux invités chinois présents dont certains n'étaient pas mécontents que la cérémonie ne s'éternise pas comme à l'accoutumée pour aller épancher leur soif au stand Maotai, la marque de Baijiu au prix exorbitant.
Si dans Les Tontons flingueurs sorti au lendemain de l'attentat de JFK à Dallas, l'eau de vie curieuse et brutale datant du mexicain rendait les clients aveugles, cet alcool à base de sorgho fermenté a le mérite de ne leur coûter qu'un oeil.
Ce qui n'est pas s'en déplaire à cette médecin urgentiste chinoise que l'on ne présente plus dont la sobriété, se contentant de jus d'orange durant la soirée, comme les bonnes manières sont appréciés par tous. À commencer par Bruno Gensburger, certainement le plus chinois des français, issu d'une lignée d'explorateurs arrivée en Chine, en 1885, dont le père vit le jour dans la concession française de Shanghaï.
En dépit de ses nombreuses activités, trop longues à énumérer, celui qui a longtemps vécu en Chine a donné un coup de main pour les sous-titrages des films du festival. Les défenseurs de la langue de Molière lui en sont infiniment reconnaissant après le supplice vécu lors des 1ères éditions du FCCF.
Malgré son don d'ubiquité, Lucie Liu n'a pas réussi à se libérer cette année comme l'an passé. Enviée, voire jalousée par ses consœurs qu'elle éclipse, cette présentatrice star de Phœnix TV promue au grade de rédac-chef est l'une des valeurs les plus sûres des relations entre la Chine et la France auxquelles cette stakhanoviste du micro oeuvre sans relâche.
Aperçue avec Nelson Monfort, nul ne sait si elle lui a demandé de lui présenter son complice Philippe Candeloro avec qui ce polyglote, souvent raillé, forme un couple aussi célèbre que Smith & Wesson.
En 2014, lors des JO à Sotchi, le CSA avait adressé une mise en garde à France Télévisions pour leurs propos sexistes. En revanche, en 2016, lors des JO de Rio, l'auteur des “petits Pikachu” en parlant des gymnastes japonaises n'était pas notre patineur médaillé de bronze aux JO de Lillehammer mais un retraité des anneaux et du cheval d'arçons.
D'autres invités qui n'auraient manqué pour rien au monde ce cocktail ont opté pour le Chassagne-Montrachet (village) en picorant des petits fours que plusieurs convives chinois ont pris en photo sous tous les angles avant de les poster sur Wechat.
Durant la soirée, l'absence de Buon Tan a suscité beaucoup de commentaires, la présence de Wai-Ming Lung, en revanche beaucoup d'intérêt. Né à Hong Kong, ce misanthrope mondain comme il se définit a été très entouré par 2 copines chinoises mariées à des exploitants de mines en Afrique, attirées par sa fine connaissance de l'art de vivre à la française. Nul risque de voir ces 2 fashion victims discuter de la question théologique du sexe des anges avec Sony Chan.
Que l'on se rassure même si le député LREM connaît la signification des 7 sacrements, ce chiffre est également celui du nombre de membres du Politburo du PCC, des samouraïs, des mercenaires et des pêchés capitaux qui a fait l'objet d'un film, Seven (1996).
Encadré par les officiels, on reconnait sur la photo les 2 jeunes actrices, la réservée Chen Shu et la pétillante Anaïs Demoustier, invitées de cette 9e édition. La 1e a joué dans Seul sur Mars (2015) de Ridley Scott. Quant à la seconde dont la présence n'est pas sans rappeler celle de Françoise Dorléac, elle est promise à un bel avenir.
Quinze jours plus tôt, lors du diner au Centre Pompidou de la France China Foundation auquel Zhai Jun a assisté, Olivia Andrez, sa directrice générale, portait une robe de la même couleur, signe de chance et de prospérité en Chine. Là aussi l'absence de Yan Lan, la responsable de Lazard en Chine et auteur du livre Une famille au cœur de l’histoire de la Chine, n'est pas passée inaperçue.
L'année où la France et la Chine fêtent le 55e anniversaire de leurs relations diplomatiques, a été l'occasion pour le FCCF de procéder à certains changements. Outre celui du lieu de la cérémonie transféré du Gaumont Marignan au Meurice, son équipe a été resserrée autour de Jean-Chrétien Blanc et de Noël Garino, ses 2 piliers. Ce dernier ayant l'avantage de porter le prénom symbolisant la naissance du Christ mais également celle du “Grand Timonier”. Reprise par le CCC, sa communication et sa coordination ont été confiées à Tu Xiong.
Discret et efficace, ce jeune fonctionnaire chinois est également en charge de celles du Festival des opéras (traditionnels) chinois. Une expérience unique à découvrir mais à renouveler avec modération pour éviter de finir sourd. À moins d'avoir été maoïste et de l'être resté par nostalgie d'une époque (la révolution culturelle) heureusement révolue.
Si cette manœuvre de Mao pour restaurer son prestige considérablement terni et détruire l'appareil politique qu'il a lui même mis en place a fait l'objet de nombreux films comme Coming Home de Zhang Yimou éclipsé au profit du Dernier Loup de Jean-Jacques Annaud, en revanche c'est moins le cas pour "Le grand bond en avant" et la terrible famine (45 millions de morts) qu'il entraîna.
Quant au nombre de films projeté cette année, il a été délibérement limité à 7, idem pour les projections (2 par film et par cinéma) comme il est d'usage dans les autres festivals.
Les passionnés de film de gangsters comme Chasing the Dragon (8e édition), The Wasted Times (7e édition) ou Shanghaï Triad (1995) réalisé par Zhang Yimou pourront toujours se consoler si Project Gutenberg n'était pas suffisamment vintage à leurs yeux, en se plongeant avec délectation dans le roman Hong Kong Gang de Ma Kafai publié aux éditions Slatkine & Cie.
Prévu au départ dans la sélection, So Long My Son de Wang Xiaoshuai, Ours d'argent au 69e Festival de Berlin (Meilleure actrice et meilleur acteur), a été retiré compte tenu de sa distribution en France. L'enterrement par le gouvernement chinois de sa politique de l'enfant unique n'étant certainement pas étranger au visa délivré par le Sarft à ce film de 3h05.
Également très poignant mais moins long, Ala Changso de Sonthar Gyal, tourné dans les magnifiques paysages du Sichuan et du Tibet, a ravi les spectateurs du FCCF qui l'ont vu.
Evidemment Made in China, une comédie sur un trentenaire chinois rejetant ses origines ne faisait pas partie de la sélection. Diffusé sur 378 écrans, ce film français a enregistré 174.000 entrées en 1e semaine.
Présent l'an passé quand Havas avait récupéré le budget com du FCCF, Canal + qui envisage de supprimer 20% de ses effectifs en France, a été avantageusement remplacé de manière fortuite par M6. À l'occasion d'un reportage sur le palace du groupe Dorchester Collection, la chaîne a filmé la cérémonie et son cocktail offrant au FCCF une visibilité inattendue. Comme à leur habitude, les médias chinois ont accordé beaucoup d'importance à cet évènement.
Lequel a été l'occasion de constater le retour en grâce de Zhang Yimou dont le film Shadow, une intrigue de palais, d'un esthétisme à couper le souffle, ressemble à s'y méprendre à une aquarelle à l'encre de chine. Celui de Fan Bing Bing, condamnée pour fraude fiscale l'an passé, ne devrait pas tarder comme le montre les bonnes réactions après l'annonce de sa rupture avec le comédien et producteur Li Chen au bout de 4 ans de vie commune.
Après avoir déchaîné les foudres de Pékin avec Sept ans au Tibet (1997) puis celle de Bercy après l'adaptation du Totem du loup de Jiang Rong, la réhabilitation de ce réalisateur français épinglé par les Panama Papers comme Deng Jiagui, beau-frère de Xi Jinping, n'est pas acquise.
Celle de l'invitée d'honneur de la 7e édition du FCCF s'annonce mieux que bien comme l'a été cette édition en dépit des contraintes et du temps imparti pour la réaliser. Inutile de rappeler qu'impossible n'est pas français ! Cela serait mal venu et pourrait passer pour de la forfanterie.