Lisea refinance sa dette en levant la garantie de l’Etat

janvier 16, 2019

En pleine polémique sur le constructivisme russe, il n'aurait pas été raisonnable de laisser à SG la totalité de l'underwritting du refinancement de la LGV SEA.
Au risque pour la banque rouge et noire, non pas de disparaître des écrans radar comme Jeanne Mas tombée dans l'oubli mais de rappeler “le train de la mort” du général Strelnikov semant la désolation sur son passage dans Docteur Jivago.
Du coup, retrouver SG encadré par BNP Paribas, BBVA, CACIB et SMBC pour syndiquer le refinancement (en grande partie) de la dette de Lisea, le concessionnaire de la LGV reliant depuis le 1er juillet 2017, Paris-Bordeaux (584 km) en 2h04, ne peut qu'apaiser les esprits. Et en ces temps d'agitation, chaque 7ème jour de la Genèse, cela est d'autant plus appréciable.
Pour financer ce PPP (7,8 Md€ dont 6 Md€ de travaux réalisés en 6 ans) bénéficiaire d'une subvention (3 Md€ dont 1,477 Md€) versée par les collectivités locales desservies par la LGV, des prêts bancaires (2,3 Md€) pour la plupart garantis par l'Etat, la BEI et SNCF Réseau, avaient été mis en place. Au final, l'equity atteignait 770 M€.
À l'été 2017, Lisea, détenu par Vinci (33,4% dont 28% pour Vinci Concessions), CDC Infra (25,4%), Meridiam (22%) et Ardian (19,2%), avait déjà procédé à la réduction des swap de taux faisant passer leur valeur mark to market d'1,3 Md€ à 980 M€.
Quelques mois plus tard, APG, le fonds de pension batave rachetait 68% (pour 1,2 Md€) d'Ardian Infra II (1 Md€ levé en 2007) dans lequel figure 9 participations dont Lisea.
En obtenant un rating investment grade (non public) servant de sésame pour sortir sur le marché obligataire, Lisea a anticipé de 2,5 ans le refinancement de sa dette commerciale.
Cette initiative lui a évité, le déclenchement, en juin 2021, d'un cash sweep intégral ayant notamment pour fâcheuse conséquence de suspendre la distribution des dividendes.
En cours de syndication, la dette bancaire (1,280 Md€ à 27 ans à Euribor+1,5%) est portable et refinançable sans pénalité. Son spread passe à 1,7% entre la 8ème et la 18ème année puis à 1,9% jusqu'à l'échéance.
Souscrite par plusieurs investisseurs dont Generali, Allianz, La banque Postale, Samsung Life Insurance, Aviva, Schröders, la dette obligataire (905 M€ à taux fixe) affiche 2 maturités à 30 (1,4%) et 35 ans (1,5%).
Les 2,185 Md€ obtenus ont permis de lever la garantie de l'Etat (1,060 Md€ sur les 1,770 Md€ du crédit construction) mais également de réduire les swap de taux de 400 M€ mark to market tout en rallongeant leur durée via la prise de forward.
Pour les besoins de l'opération et cela n'a pas été une mince affaire, la présence de la BEI a été maintenue comme prêteur sur le crédit construction (400 M€ sur la partie garantie et 200 M€ sur les 610 M€ non garantis) et garant en réhaussement de la LGTT (200 M€) couvrant le risque de trafic (pendant 5 ans).
Idem pour SNCF réseau, garant des fonds d'épargne (DFE) apportés par la CDC dont l'exposition a été réduite pour l'occasion de 760 à 690 M€.
Le changement de statut, au 1er janvier 2020 de SNCF Réseau et SNCF mobilité avec leur passage en société commerciale, a été prévu dans la documentation avec une clause immunisant les prêteurs d'une éventuelle privatisation de SNCF Réseau.

 

 

■ Intervenants : Rothschild & Cie (Vincent Danjoux, Alaric Audard), Clifford Chance (Daniel Zerbib, Chloé Desreumaux, David Préat), WFG (Michaël Armandou,Thierry Laloum, Antoine Bouzenquet), Allen & Overy (Driss Bererhi, Romaric Lazerges), De Pardieu Brocas (Jean-Renaud Cazali), Orrick (Amaury de Feydeau, Jean-Luc Champy), Linklaters (Bertrand Andriani, Darko Adamovic).